Pour 3,5 litres de tonkotsu (environ 10 bols de rāmen), il vous faut :

  • 13 litres d’eau
  • 3 kilos d’os de porc (ou 2,5 kilos d’os de porc et 500 grammes d’extrémités d’ailes de poulet)
  • 1 morceau de couenne de porc
  • 1 gros oignon jaune
  • Quelques brins de ciboule
  • Quelques gousses d’ail
  • Un petit morceau de gingembre
  • Une petite poignée de champignons noirs

Ces ingrédients méritent une explication. Parlons d’abord des os, l’ingrédient essentiel de ce bouillon. Idéalement, ce qu’il vous faut, ce sont des fémurs de porc. On en trouve dans les boucheries asiatiques, et on peut aussi demander à son gentil boucher d’en mettre de côté. Parfois, pas de bol, on a du mal à en trouver. Dans ces cas-là, on peut toujours utiliser une combinaison de pieds de porc et de tous les autres os disponibles. C’est ce que j’ai fait. Je me suis retrouvée avec des vertèbres, des côtes, des omoplates, et ça a très bien fait l’affaire. Et le gros avantage, c’est que c’était gratuit. Il m’a aussi donné un morceau de couenne.

Voilà pour ce qui est du cochon. Ensuite, il existe deux écoles : ceux qui optent pour le total-porc, et ceux qui veulent un bouillon un peu plus léger et mélangent une majorité d’os de porc et un peu d’os de poulet. Une fois ce choix fait, on a encore plusieurs possibilités : si on opte pour la solution avec poulet, on peut utiliser une carcasse entière ou seulement des ailes. J’ai récupéré des extrémités d’ailes, riches en collagène, chez un boucher halal fort sympathique. Ça aussi, c’était cadeau.

Pour ce qui est des légumes, certains cuisiniers n’en mettent pas dans le bouillon, mais je recommande leur usage, c’est un excellent complément aromatique. Enfin, en ce qui concerne l’eau, la quantité peut faire peur à ceux qui ne sont pas équipés d’une maxi-marmite. J’ai personnellement la chance d’en avoir une, donc la question ne s’est pas posée. Mais on peut aussi procéder en ajoutant de l’eau au fur et à mesure de la cuisson si on n’a qu’un petit modèle à disposition.

Je dis marmite et non autocuiseur, attention. Certes, on peut nettement diminuer le temps de cuisson en utilisant une cocotte-minute et on faisant cuire tout ça 2 heures sous pression. Mais comme je disais plus haut, un vrai tonkotsu se mérite. La recette traditionnelle demande du temps, et c’est ce temps qui va faire toute la différence. Les arômes ne seront pas intenses mais profonds. Voilà, vous êtes parés, passons en cuisine.

Recette du tonkotsu

Tous vos os doivent être tranchés pour pouvoir accéder à la moelle facilement. Certains bouchers le font sur demande. Si vous avez des os entiers, sortez votre marteau, il vous sera utile très bientôt. Commencez par remplir votre marmite d’eau. Faites chauffer à feu vif et éteignez le feu dès que vous avez atteint le point d’ébullition. Plongez-y tous vos os. Le but ici est de les blanchir, première étape indispensable pour obtenir un bouillon bien blanc. Laissez refroidir votre marmite d’eau et d’os pendant environ 3 quarts d’heure à température ambiante.

Égouttez ensuite vos os dans une passoire et jetez ce premier bain. Nettoyez à fond votre marmite pendant que les os finissent de refroidir. Avec les mains, des baguettes et même une brosse à dents si vous êtes du genre maniaque (j’en suis), grattez ensuite scrupuleusement la surface de tous vos os sous un filet d’eau froide pour retirer toutes les traces de sang, de viande foncée, de vaisseaux sanguins, bref, de tout ce qui pourrait altérer la blancheur du bouillon. Si vous avez opté pour l’option pieds de porc comme moi, retirez la moelle sombre qui s’y loge à l’aide des baguettes. Les ailes de poulet demandent du temps et de la patience car elles sont très vascularisées. Il ne faut pas hésiter à trifouiller, on s’en met un peu partout, on se sent vaguement cannibale devant tous ces os et toutes ces veines.

Le grand moment de violence vient quand vos os sont parfaitement propres. S’ils n’ont pas été prédécoupés, posez-les sur une surface solide et propre, et éclatez-les joyeusement à l’aide de votre marteau. Ça éclabousse, vous allez vous repeindre façon moelle de cochon, vous allez me détester un peu de vous donné envie d’essayer cette recette, mais heureusement, la partie trash est terminée.

Faites chauffer 13 litres d’eau dans votre marmite propre. Pendant que ça chauffe, occupez-vous de vos légumes. Ne les épluchez surtout pas, et tranchez-les grossièrement. Pour donner des arômes particulièrement intéressants à votre bouillon, il est recommandé de faire griller les légumes jusqu’à les carboniser en partie. Pour cela, faites-les chauffer à feu vif dans une poêle jusqu’à ce que leur surface noircisse. Cela va apporter plein d’umami à la préparation.

Quand le point d’ébullition est atteint dans votre marmite, déposez vos os, le morceau de couenne et les légumes noircis dans l’eau et continuez à faire chauffer pour reprendre l’ébullition. Réglez votre feu de manière à garder un lent bouillon sans gaspiller du gaz pour autant. À ce stade, vous avez une mission d’importance capitale : il va falloir écumer en permanence la surface de l’eau et nettoyer les bords de la marmite pour qu’aucune saleté ne s’y accroche, toujours dans le but d’obtenir un bouillon bien blanc. Continuez tant qu’il y a de l’écume. Vous devriez en venir à bout après une bonne demi-heure d’intervention. Couvrez et laissez bouillir doucement pendant 4 heures.

Au bout de 4 heures de cuisson, retirez la couenne de la marmite et réservez-la au frais, vous en aurez besoin plus tard. Couvrez à nouveau et laissez bouillir encore 8 heures. Plongez une spatule au fond de la marmite de temps à autre pour vous assurer que rien n’accroche au fond. Si vous pris l’option petite marmite, ajoutez de l’eau régulièrement.

Après 12 heures de bouillon au total, vous obtiendrez un résultat totalement opaque de couleur claire. À ce stade, retirez le couvercle et augmentez l’intensité du feu pour faire réduire jusqu’à obtenir environ 3,5 litres de bouillon, ce qui devrait prendre une heure supplémentaire. Vérifiez bien que rien n’accroche à ce stade, ce serait dommage de tout louper au dernier moment. Vous pourrez ensuite éteindre votre feu et laisser la marmite refroidir un peu.

La dernière étape, c’est le filtrage. Vous pouvez procéder comme vous voulez. Pour ma part, j’ai d’abord retiré mes os et légumes à la pince un à un, puis j’ai passé le bouillon au chinois deux fois (en nettoyant le chinois à chaque fois évidemment), puis dans un autre chinois encore plus fin. Vous pouvez retirer l’excédent de gras qui apparaitra à la surface du bouillon filtré. Pour un fini vraiment traditionnel, sortez votre couenne gardée au frais et ciselez-la très finement. Ajoutez-en un peu au bouillon et battez légèrement le tout au fouet pour dissoudre légèrement – pas complètement – les minuscules morceaux de couenne. C’est prêt !

 

Commencez par faire votre shōyudare. Ce n’est pas très compliqué, je vous rassure. Pour aller avec les quantités de tonkotsu à votre disposition, il vous faut  :

  • 300 ml de dashi bien parfumé (prenez du dashi instantané si vous en avez marre)
  • 100 ml de sake
  • 1 cuillerée à soupe de mirin
  • 500 ml de sauce soja
  • 1 cuillerée à soupe de sel
  • 150 ml de la sauce de votre chāshū préparé la veille
  • Pour plus d’umami, vous pouvez ajouter 150 grammes de katsuobushi, un morceau de kombu et 80 grammes de petits poissons séchés.

Vous n’avez rien à faire à part combiner tous ces ingrédients dans une casserole et faire chauffer doucement jusqu’à obtenir un frémissement. Le mélange ne doit surtout pas bouillir. Coupez le feu et laissez tous les ingrédients se rencontrer intimement. Idéalement, vous pouvez faire le shōyudare avant le tonkotsu, pour que tout ait bien le temps d’infuser.

Vous pourrez ensuite filtrer cette sauce qui sera prête à l’emploi. Elle pourra être réchauffée au dernier moment, mais ce n’est pas forcément nécessaire si vos nouilles et votre bouillon sont bien chauds.

Quand le shōyudare et le tonkotsu sont prêts, il n’y a plus qu’à préparer les nouilles selon les instructions inscrites sur le paquet. Il est préférable d’opter pour une cuisson al dente car elles vont continuer à cuire légèrement dans le bouillon brûlant. Pendant qu’elles cuisent, servez dans chaque bol environ 35 ml de shōyudare et 350 à 400 ml de tonkotsu. Ajustez selon vos préférences.

Ajoutez une portion de nouilles cuites, une tranche de chāshū (ou deux ou trois, vous êtes le chef) et une petite poignée de ciboule ciselée.